En cette veille du 49ème anniversaire de la Marche Verte, se remémorer le discours historique de feu Hassan II du 5 novembre 1975 aux 350 000 marcheurs stationnés à la frontière, prêts à s’avancer Coran et drapeau à la main, rappelle que la récupération du Sahara marocain fut d’abord une épopée de foi et de paix, avant de devenir une lutte armée pour la défense de l’intégrité territoriale.
Cette dualité – marche pacifique puis défense militaire – caractérise la complexité de la récupération du Sahara. Si la Marche Verte représente un moment de génie stratégique unique dans l’Histoire, transformant une revendication territoriale en mobilisation populaire pacifique, les années qui suivirent rappellent que cette terre a aussi été reconquise au prix du sang. Des milliers de soldats marocains ont payé de leur vie la défense de ces provinces, dans des batailles dont l’histoire reste à écrire.
Le Maroc dût rapidement faire face à la réalité du terrain. Après le triomphe pacifique de la Marche Verte, le pays s’est trouvé confronté à une guerre d’usure. Les Forces Armées Royales ont dû mener des opérations militaires complexes dans un terrain difficile, construire le mur de défense, et surtout payer un lourd tribut humain. Cette phase militaire, souvent occultée par le symbole pacifique de la Marche Verte, fut pourtant déterminante dans la consolidation de la souveraineté marocaine.
La construction du mur de défense, une prouesse militaire et logistique, illustre la détermination marocaine à protéger ces territoires chèrement acquis. Cette barrière, bien plus qu’une simple ligne de défense, est devenue le symbole de l’engagement indéfectible du Maroc à défendre son intégrité territoriale, quel qu’en soit le prix.
Parallèlement aux opérations militaires, le Maroc a poursuivi une stratégie de développement ambitieuse. Les provinces du Sud sont devenues un laboratoire de développement intégré où les investissements massifs dans les infrastructures, l’éducation et la santé ont progressivement transformé le visage de la région. Cette dualité entre défense militaire et développement économique caractérise l’approche marocaine.
Aujourd’hui, les provinces sahariennes sont en passe de devenir un hub économique majeur. Le port de Dakhla Atlantique, les installations d’énergies renouvelables, et le développement industriel témoignent d’une vision qui dépasse largement la simple revendication territoriale. Cette transformation économique honore tant le sacrifice des martyrs que l’audace des marcheurs de 1975.
Sur le plan diplomatique, le Maroc a su capitaliser sur cette double légitimité : celle d’une récupération initialement pacifique et celle d’une défense assumée de son territoire. La reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine et l’ouverture de nombreux consulats à Laâyoune et Dakhla confirment la justesse de cette approche.
La gestion du dossier saharien illustre la sophistication de la stratégie marocaine. Après avoir démontré sa capacité à mobiliser pacifiquement son peuple, puis sa détermination à défendre militairement son territoire, le Maroc propose aujourd’hui une solution politique d’autonomie sous souveraineté marocaine, largement considérée comme la base la plus crédible pour une solution définitive.
Les défis sécuritaires actuels au Sahel donnent une nouvelle dimension aux sacrifices consentis. Les provinces du Sud, stabilisées au prix de lourds sacrifices, constituent aujourd’hui un rempart contre l’instabilité régionale. La coopération sécuritaire avec de nombreux pays africains et occidentaux s’appuie sur cette stabilité durement acquise.
L’intégration régionale représente peut-être la meilleure justification des sacrifices consentis. Les provinces du Sud, autrefois zone de conflit, sont devenues un moteur de l’intégration africaine, participant activement à la vision royale d’un développement continental solidaire.
Quarante-neuf ans après la Marche Verte, le Sahara marocain illustre comment une revendication territoriale légitime, portée d’abord par une mobilisation pacifique, défendue ensuite par les armes, peut se transformer en un projet de développement régional inclusif. Le sang des martyrs a fertilisé une terre où fleurissent aujourd’hui des projets porteurs d’espoir pour toute une région.
Le discours royal attendu demain s’inscrit dans cette continuité historique. Il honorera sans doute tant l’audace pacifique des marcheurs que le sacrifice des martyrs, tout en projetant les provinces du Sud vers un avenir où elles jouent pleinement leur rôle de pont entre le Maghreb et l’Afrique subsaharienne.
La transformation du Sahara marocain en 49 ans démontre qu’une cause juste, portée d’abord par la force morale d’un peuple, défendue ensuite par le sacrifice de ses soldats, peut aboutir à un projet de développement bénéficiant non seulement au Maroc mais à l’ensemble du continent. C’est dans ce mariage entre idéalisme pacifique initial et réalisme militant subséquent que réside peut-être la plus grande leçon de l’épopée saharienne : la paix durable se construit parfois au prix du sang.