- Abdelhakim Yamani
L’intervention récente de Staffan de Mistura devant le Conseil de sécurité soulève de sérieuses questions quant à l’efficacité de son mandat d’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental. Il est important de rappeler que M. de Mistura a une longue histoire de missions diplomatiques qui se sont soldées par des résultats mitigés, voire des échecs notables. Que ce soit en Irak (2007-2009), en Afghanistan (2010-2011), ou en Syrie (2014-2018), ses efforts n’ont pas abouti aux résolutions de conflits espérées.
Dans le contexte du Sahara occidental, sa récente proposition d’une partition potentielle du territoire ne représente pas seulement un écart par rapport à son mandat, mais s’apparente à une véritable auto-disqualification de sa position. Cette démarche contrevient directement aux termes de la résolution 2703 (2023) du Conseil de sécurité, qui définit clairement le cadre de son action :
« Réaffirmant sa volonté d’aider les parties à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et notant le rôle et les responsabilités dévolus aux parties à cet égard. »
En outrepassant les limites clairement définies par cette résolution, M. de Mistura a non seulement compromis sa crédibilité et son impartialité, mais il a également démontré une incompréhension fondamentale de son rôle et des enjeux complexes de la région.
Il est désormais impératif que M. de Mistura reconnaisse son incapacité à mener à bien la mission qui lui a été confiée. Depuis sa nomination, aucun progrès tangible n’a été réalisé dans la résolution du conflit. Au contraire, sa proposition de partition, ressuscitant une idée précédemment rejetée et enterrée, fait régresser le dossier de plusieurs années. Cette démarche ne fait qu’ajouter de la complexité à une situation déjà délicate, au lieu de favoriser le rapprochement des parties comme le stipule son mandat.
En remettant sur la table des négociations une solution obsolète et contestée, M. de Mistura a non seulement échoué à faire avancer le processus de paix, mais il a également risqué de raviver des tensions que la communauté internationale s’efforce depuis longtemps d’apaiser. Cette action irréfléchie remet en question sa compréhension des dynamiques régionales et sa capacité à naviguer dans les subtilités diplomatiques nécessaires à la résolution de ce conflit de longue date.
De plus, la proposition de partition semble étrangement alignée avec certains intérêts géostratégiques de l’Algérie, notamment l’accès à l’océan Atlantique et l’affaiblissement de la position géostratégique du Maroc en Afrique. Cette coïncidence troublante soulève des questions légitimes sur l’impartialité de M. de Mistura et sur sa capacité à agir en tant que médiateur neutre, comme l’exige son rôle.
Il est crucial de rappeler que depuis 2007, la seule solution concrète et viable sur la table des négociations est la proposition marocaine d’autonomie. Cette initiative, loin d’être une simple proposition unilatérale, a recueilli l’adhésion croissante de nombreux pays à travers le monde. Plus significatif encore, plusieurs nations ont franchi le pas en reconnaissant explicitement ou implicitement la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, témoignant ainsi de la crédibilité et de la pertinence de cette approche.
En outrepassant son mandat, De Mistura s’est auto-disqualifié et logiquement devrait reconnaître qu’il est aujourd’hui dans l’impossibilité de mener à bien sa mission dans laquelle il n’a pas avancé d’une iota. Bien au contraire, il fait opérer au dossier un retour en arrière de plusieurs années en mettant sur la table des négociations une solution qu’il a littéralement ressuscitée.
L’échec de M. de Mistura à respecter les paramètres de son mandat et à produire des résultats concrets après plusieurs années en poste soulève des questions sérieuses sur la viabilité de son rôle. Il serait dans l’intérêt de toutes les parties concernées, et dans celui du processus de paix lui-même, que M. de Mistura tire les conclusions qui s’imposent de cette situation et envisage de se retirer de sa position.
Il est particulièrement troublant de noter que, comme par hasard, ces développements coïncident avec une visite du chef d’état-major algérien Chengriha en Mauritanie. Cette visite, dont le timing ne peut être ignoré, soulève des questions sur une possible coordination entre certains acteurs régionaux et l’initiative controversée de M. de Mistura.
De plus, il convient de rappeler que M. de Mistura a effectué une visite non programmée à Tindouf juste quelques jours avant son briefing devant le Conseil de sécurité. Cette séquence d’événements – la visite à Tindouf, suivie rapidement par la proposition de partition lors du briefing – ne fait que renforcer les soupçons quant à l’impartialité de l’Envoyé personnel et à l’origine réelle de cette proposition de partition.
En conclusion, la communauté internationale, et en particulier le Conseil de sécurité des Nations Unies, doit prendre acte de cette impasse et des actions contreproductives de M. de Mistura. Il est temps d’envisager une nouvelle approche, potentiellement sous la direction d’un nouvel envoyé, qui respectera scrupuleusement le cadre défini par la résolution 2703 et travaillera de manière impartiale vers une solution mutuellement acceptable, sans raviver des propositions déjà rejetées qui ne font que compliquer davantage la situation et compromettre les efforts de paix déployés jusqu’à présent.