Par Abdelhakim Yamani
Le 26 novembre 2024, le message du Roi Mohammed VI au Président du Comité des Nations Unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien intervient dans un contexte régional marqué par l’escalade des tensions à Gaza. Cette communication permet d’analyser la position marocaine et d’examiner certaines perceptions concernant les relations entre le Maroc et Israël.
Une analyse des documents diplomatiques révèle que le Maroc n’est pas signataire des Accords d’Abraham. Le pays a paraphé, le 22 décembre 2020, une Déclaration Tripartite avec les États-Unis et Israël. Cette distinction juridique et diplomatique se reflète dans la nature actuelle des relations maroco-israéliennes : l’absence d’ambassades et d’ambassadeurs accrédités, remplacés par des bureaux de liaison dirigés par des chefs de bureau sans lettres de créance.
L’examen de la politique étrangère marocaine montre une implication ancienne dans le dossier palestinien. La présidence du Comité Al-Qods, organe de l’Organisation de la Coopération Islamique, constitue un des leviers d’action du Maroc sur la question de Jérusalem. Cette position s’inscrit dans un contexte historique caractérisé par la présence séculaire d’une communauté juive au Maroc, facteur qui influence la diplomatie du pays dans la région.
La dimension populaire de la cause palestinienne au Maroc représente un élément significatif. Depuis le 7 octobre 2023, les manifestations de soutien à la Palestine se sont multipliées dans 41 villes du pays, mobilisant des millions de citoyens. La commémoration du début du conflit à Gaza, le 6 octobre 2024 à Rabat, a notamment rassemblé plusieurs centaines de milliers de manifestants. Cette mobilisation populaire massive et continue illustre l’ancrage profond de la cause palestinienne dans la société marocaine, dépassant le cadre strictement diplomatique pour s’inscrire dans une dynamique sociétale plus large.
L’analyse du message royal du 26 novembre 2024 fait apparaître six axes diplomatiques concernant Gaza : l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat et l’arrêt des violences en Cisjordanie, la protection des populations civiles palestiniennes, la levée des restrictions sur l’aide humanitaire, le soutien à l’UNRWA, l’opposition aux déplacements forcés de population, et l’appel à des négociations pour une solution à deux États.
Sur le plan opérationnel, trois convois d’aide humanitaire marocains ont été acheminés vers Gaza, transportant notamment du matériel médical spécialisé. Ces actions s’ajoutent aux initiatives diplomatiques du pays dans la région et répondent aux attentes d’une opinion publique fortement mobilisée.
L’étude de la position marocaine met en lumière une approche qui tente de concilier plusieurs impératifs : maintien de canaux de communication avec les différentes parties, engagement humanitaire, et défense de principes diplomatiques traditionnels. Cette politique s’inscrit dans la continuité historique tout en s’adaptant aux évolutions géopolitiques régionales.
L’examen des faits montre que la diplomatie marocaine sur le dossier palestinien se caractérise par une recherche d’équilibre entre pragmatisme diplomatique et positions de principe. Cette approche, qui se distingue des alignements automatiques, reflète la complexité des enjeux régionaux et la multiplicité des acteurs impliqués dans ce dossier.
La position marocaine illustre ainsi les défis auxquels font face les acteurs régionaux dans leur tentative de contribuer à la résolution du conflit israélo-palestinien, entre maintien des principes diplomatiques traditionnels et adaptation aux nouvelles réalités géopolitiques du Moyen-Orient. La forte mobilisation populaire en faveur de la cause palestinienne constitue un facteur important dans cette équation, soulignant la convergence entre sentiment populaire et position diplomatique officielle.