Dans un contexte pré-électoral de plus en plus tendu, l’Algérie connaît une nouvelle vague d’arrestations d’opposants politiques. Ces actions soulèvent de sérieuses inquiétudes quant à l’état de la liberté d’expression et au traitement de l’opposition dans le pays, à quelques semaines des élections présidentielles prévues le 7 septembre 2024.
Arrestation de Fethi Ghares
Circonstances de l’interpellation
Le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) a rapporté l’arrestation de Fethi Ghares, responsable du Mouvement démocratique et social (MDS), à son domicile à Alger. Selon son épouse, Ghares a été appréhendé par trois policiers en civil sans aucune convocation officielle.
« Ils ont affirmé qu’il devait expliquer certaines choses, mais ne lui ont fourni aucune convocation », a-t-elle déclaré dans une vidéo diffusée sur Facebook. Malgré les assurances des agents qu’il serait conduit au commissariat voisin, son lieu de détention est resté flou, aucune déclaration officielle n’ayant été émise concernant son arrestation.
Profil de Fethi Ghares
Âgé de 49 ans, Fethi Ghares est un militant de gauche bien connu en Algérie :
– Participant actif au mouvement de protestation Hirak en 2019
– Précédemment arrêté en juin 2021 et condamné à deux ans de prison en janvier 2022
– Libéré en mars 2022 suite à une réduction de peine en appel
– Accusé d' »atteinte à la personne du président de la République », d' »outrage à corps constitué », et de « diffusion d’informations nuisant à l’unité nationale » et à « l’ordre public »
Son mouvement, le MDS, successeur du Parti communiste algérien, a été déclaré interdit en février 2023.
Arrestation d’Ali Belhaj et son fils
Parallèlement, les services de renseignement algériens ont procédé à l’arrestation de Cheikh Ali Belhaj et de son fils Abdel Fattah Belhaj, respectivement lundi et mardi derniers.
Ali Belhaj, figure emblématique de l’islamisme politique en Algérie et ancien vice-président du Front Islamique du Salut (FIS), parti dissous en 1992, reste une voix critique du pouvoir malgré des années de répression.
Les deux hommes sont actuellement détenus « pour enquête » dans l’un des centres de sécurité de la capitale Alger, sans que les motifs précis de leur arrestation n’aient été officiellement communiqués.
Contexte politique tendu
Ces arrestations s’inscrivent dans un climat politique particulièrement chargé :
- 1. Élections présidentielles imminentes : Prévues pour le 7 septembre 2024, ces élections sont considérées comme un test crucial pour la démocratie algérienne.
- 2. Candidature de Tebboune : Le président sortant, Abdelmadjid Tebboune, se prépare à solliciter un second mandat.
- 3. Restrictions accrues : Les mesures contre d’autres figures de l’opposition, comme Karim Tabbou, emblématique du Hirak, ont récemment été renforcées.
- 4. Interdiction de mouvements politique : Plusieurs mouvements d’opposition, dont le MDS de Fethi Ghares, ont été interdits.
Analyse et implications
1. Musellement systématique de l’opposition : Ces arrestations semblent s’inscrire dans une stratégie visant à réduire au silence les voix critiques à l’approche des élections.
2. Méthodes répressives : L’utilisation d’arrestations sans mandat et le flou entourant les motifs d’interpellation soulèvent des questions sur le respect de l’État de droit.
3. Climat de peur : La multiplication des arrestations crée un environnement peu propice à un débat politique ouvert et équitable.
4. Légitimité du processus électoral : Le traitement de l’opposition soulève des doutes sérieux sur l’équité et la transparence des prochaines élections.
La vague d’arrestations soulève de sérieuses inquiétudes quant à la capacité du système politique algérien à garantir un véritable pluralisme et à respecter les libertés fondamentales.