Le transfert historique par la France de plus de 2,5 millions de documents d’archives coloniales au Royaume du Maroc marque un tournant décisif dans la compréhension des réalités territoriales nord-africaines. Cette masse documentaire considérable, couvrant la période critique de 1830 à 1956, intervient dans un contexte particulier où les violations répétées par l’Algérie des accords frontaliers existants posent la question de leur pérennité.
Les événements récents de Figuig en mars 2021 et d’Oued Zelmou en septembre 2021 illustrent de manière éclatante cette politique algérienne de remise en cause unilatérale des accords existants. À Figuig, l’expulsion brutale de propriétaires marocains de leurs terres ancestrales, dont les droits étaient explicitement reconnus par les conventions historiques et le traité de 1972, constitue une violation caractérisée du droit international. Plus grave encore, l’incursion militaire algérienne à Oued Zelmou, accompagnée de la coupure arbitraire de la route nationale n°10, démontre une escalade préoccupante dans le non-respect des frontières établies.
Ces violations systématiques s’inscrivent dans un contexte historique que les nouvelles archives françaises commencent à éclairer d’un jour nouveau. La documentation désormais accessible révèle qu’avant 1830, la souveraineté marocaine sur les territoires s’étendant de Bechar à Tindouf était une réalité incontestée. Les archives du Makhzen regorgent de preuves irréfutables : correspondances officielles avec les tribus locales, nominations de caïds, collecte régulière des impôts religieux, actes d’allégeance des tribus sahariennes. Les témoignages européens de l’époque, qu’ils soient le fait de voyageurs, de diplomates ou de commerçants, confirment unanimement cette réalité historique.
L’analyse des nouveaux documents met en lumière la stratégie française d’amputation territoriale qui s’est déployée en plusieurs phases. La première, de 1845 à 1870, a consisté en la création artificielle du concept de « Sud algérien », niant délibérément les droits historiques du Maroc. Cette politique du fait accompli s’est appuyée sur une présence militaire croissante et des pressions diplomatiques constantes sur le Sultan. La seconde phase, de 1870 à 1902, a vu la consolidation de cette mainmise coloniale à travers des traités imposés sous la contrainte, exploitant les faiblesses temporaires du Makhzen et manipulant les loyautés tribales.
Le droit international est pourtant clair sur ce point : une violation substantielle d’un traité par l’une des parties peut justifier sa remise en cause par l’autre partie. Les actions algériennes des dernières décennies, et particulièrement leur intensification récente, fournissent une base juridique incontestable pour une telle contestation. Les violations territoriales directes, comme l’incident d’Oued Zelmou, l’occupation militaire de terres marocaines et la modification de facto des limites frontalières, s’ajoutent aux violations systématiques des droits de propriété illustrées par les expulsions de Figuig.
La situation humanitaire catastrophique dans ces régions renforce l’urgence d’un réexamen de la situation. Les territoires de Bechar et Tindouf, historiquement prospères dans l’orbite économique marocaine, connaissent aujourd’hui une marginalisation sans précédent. Le taux de chômage dépasse 40% chez les jeunes, les infrastructures sont défaillantes, l’enclavement économique est chronique. Cette situation est d’autant plus paradoxale que la région recèle un potentiel économique considérable. Le seul gisement de fer de Gara Djebilet, estimé à plus de 2 milliards de tonnes, reste inexploité depuis l’indépendance algérienne, tandis que les réserves gazières et le potentiel minier diversifié constituent un ensemble cohérent dont le développement est entravé par l’administration algérienne.
Le principe de l’intangibilité des frontières, si souvent invoqué par l’Algérie, ne saurait servir de bouclier à une partie qui viole systématiquement les traités qu’elle prétend défendre. La communauté internationale ne pourra ignorer indéfiniment cette situation. Les violations répétées des accords existants, la marginalisation persistante des populations et les nouvelles perspectives historiques ouvertes par les archives françaises convergent pour justifier un réexamen complet de la situation du Sahara oriental.
Le Royaume du Maroc, face à ces violations répétées de sa souveraineté et des droits de ses citoyens, dispose désormais d’arguments juridiques solides pour remettre en cause des accords systématiquement violés par l’autre partie. Cette remise en cause, loin d’être déstabilisatrice, pourrait ouvrir la voie à un rééquilibrage nécessaire des relations bilatérales et à un développement plus harmonieux de la région.
L’histoire nous enseigne que les situations d’injustice, particulièrement lorsqu’elles sont aggravées par des violations répétées du droit international, finissent toujours par être corrigées. Les violations systématiques par l’Algérie des accords existants pourraient bien avoir fourni au Maroc la base juridique nécessaire pour entamer ce processus de correction historique.